Une question essentielle est demeurée jusqu’ici sans réponse dans les débats : qu’y a-t-il de bon dans l’altérité spécifiquement sexuelle du couple que nous ne parvenons plus à identifier ?
A travers la présence offerte des corps différents de ses parents, l’enfant acquiert une vue binoculaire sur la vie, il en saisit intuitivement le relief et jouit de la vérité de son origine. Il accède au langage propre et sans parole du corps, langage commun à toute l’humanité de ses frères et soeurs à travers le monde. Autant qu’elle le pourra et avec ses propres limites, une famille humanise l’enfant comme aucun autre lieu car elle lui apprend que « corps » et « amour » sont indissociables.
Son expérience des deux pôles masculin et féminin dans le quotidien du foyer façonne son intériorité, nourrit son psychisme, pose des repères et inscrit dans sa mémoire visuelle et corporelle, une vérité essentielle sur sa propre personne. Dans ce cadre familial, père et mère donnent à l’enfant accès à sa propre existence : comme il découvre le soleil pour le jour et la lune pour la nuit, il perçoit entre ses parents un rythme secret qui parle du temps de la vie qui est venue et qui continue de le porter à la vie. Ce cadre dont tout enfant hérite en venant dans le monde est fragile. Il peut se rompre pour de multiples raisons, mais il réalise de manière immédiate et directe, sans effort ou volonté de notre part un développement intérieur, une action qui inspire à l’enfant une connaissance de lui-même qu’il ne trouve nulle part ailleurs : il est amour.
Il y a donc un « je ne sais quoi » qui appartient à l’humanité et qu’on ne peut ni nommer, ni mesurer, ni remplacer. Un « presque rien » que permet l’altérité établissant en nous l’intuition que la vie reçue a un sens, que la vie est rencontre, que l’amour est promesse car de cette union procèdent ma vie et la votre. Ainsi s’acquiert la certitude que le meilleur de la vie en ce monde se trouve là. Là s’apprend combien l’amour fait vivre.
Si nous défendons la spécificité du mariage homme-femme, c’est parce que nous défendons le patrimoine de notre humanité commune. Nos techniques aussi puissantes soient-elles « produiront » la vie, mais ne la « donneront » jamais comme ce cadeau que seules peuvent offrir un homme et une femme dans l’union amoureuse de leur corps complémentaires qui engendre et donne sens à la vie.